René Vernadet, né en 1927, ne connaîtra pas son père, dentiste, décédé en 1930. Sa mère, Marguerite, dite Maggy, est maquilleuse de cinéma et le petit René, fils unique, la suit de plateau en plateau. Ce milieu artistique est leur univers, ils côtoient Christian Jacques, Bourvil, Sacha Guitry, Cocteau… Il aurait pu devenir acteur mais, à l’époque, c’est surtout la technique qui le motive. Il se lance donc dans des études pointues en laboratoire cinématographique. Ami de Charles Aznavour et surtout de Gilbert Bécaud, son « frère » pour lequel il écrira plus tard les paroles d’une ou deux chansons, ainsi que pour Yves Montand.
La rencontre entre sa caméra et la pratique de l’escalade à Fontainebleau avec les cadors de l’époque comme Lucien Berardini, Robert Paragot ou Edmond Denis va provoquer le déclic de sa carrière : il les suit à Chamonix, fait connaissance avec le photographe cinéaste Georges Tairraz, avec lequel il tourne, en 1947, les images de la Semaine internationale du ski. C’est parti… Une série de courts métrages comme "Escale au Saussois", "La République nous appelle", "Glaces éternelle"s, "Les Belles vacances", portent sa signature toujours empreinte de didactisme et d’humour. Après un « intermède » de dix-sept documentaires tournés pendant la guerre d’Algérie pour le Gouvernement Général, et de nombreux allers-retours entre Paris et Chamonix, il s’installe, en 1958, au pied du mont Blanc, avec son épouse Mireille qui a déjà derrière elle une belle carrière de monteuse de cinéma. René Vernadet tourne films sur films comme opérateur spécialisé dans les scènes vertigineuses dont ses deux morceaux de bravoure, Les Étoiles de Midi de Marcel Ichac, en 1959, et Mort d’un guide de Jacques Ertaud, en 1975. La même année, il signe les images des Horizons Gagnés, du grand Gaston Rébuffat, impressionné par sa maîtrise. Ce film remporte un immense succès lors de conférences de Connaissance du Monde dont Vernadet deviendra un habitué. René Vernadet est également sollicité pour des longs métrages de fiction, et non des moindres, Le Train de John Frankenheimer, Fifi La Plume d’Albert Lamorisse, Sur un Arbre Perché de Serge Korber, avec Louis de Funès, ou encore La Voie Jackson, téléfilm fleuve de Gérard Herzog tourné à Chamonix, en 1979... Mais la passion du Mont-Blanc ne suffit pas à René Vernadet. Dès les années 1950, il a l’occasion d’arpenter l’Inde pour réaliser des films commandés par le Secours Catholique. Par la suite, son amitié avec le philosophe italien Lanza del Vasto le conduit au Tibet qui va véritablement l’aimanter ; dix-sept films et quatre livres.
Très actif au sein de l’association Les amis du Vieux Chamonix, il passe un temps fou à éplucher, dans un réduit encombré, documents poussiéreux et cartes postales anciennes, à numériser plaques de verre et bobines de films d’un autre âge. Extrêmement sollicité, il répond présent pour animer soirées au cinéma ou à la prestigieuse salle du Majestic de Chamonix, capable de commenter brillamment en direct des films muets comme de raconter des anecdotes de tournage souvent très drôles. Mais lorsqu’on lui demande une nouvelle fois pourquoi il n’a pas le vertige, il répond tout simplement : « je ne sais pas, je ne m’en occupe pas ». En 2017, René Vernadet vient d’entamer son vingt-sixième voyage au Tibet. Il a 90 ans…